Antidotes est un recueil d'articles, de polémiques et de pamphlets que l’académicien français, Ionesco, a choisi parmi ses différents articles de 1963 à 1977. Il y exprime ses pensées concernant, entre autres, le pouvoir politique, le rôle de l’église, le rôle de l’Académie française, l’expérience communiste à l’Europe de l’est,…
Ionesco est déroutant par ses pensées qui évoluent constamment jusqu’à en paraître contradictoires, et pour cause, il a toujours osé :
« Oser ne pas penser comme les autres
Ne pas penser comme les autres vous met dans une situation bien désagréable. Ne pas penser comme les autres, cela veut dire simplement que l’on pense. Les autres, qui croient penser, adoptent en fait, sans réfléchir, les slogans qui circulent, ou bien, ils sont la proie de passions dévorantes qu’ils se refusent d’analyser. Pourquoi refusent-ils, ces autres, de démonter les systèmes de clichés, les cristallisations de clichés qui constituent leur philosophie toute faite, comme des vêtements de confection ? En premier lieu, évidemment, parce que les idées reçues servent leurs intérêts ou leurs impulsions, parce que cela donne bonne conscience et justifie leurs agissements. Nous savons tous que l’on peut commettre les crimes les plus abominables au nom d’une cause « noble et généreuse ». Il y a aussi le cas de ceux, nombreux, qui n’ont pas le courage de ne pas avoir « des idées comme tout le monde ou des réactions communes ». Cela est d’autant plus ennuyeux que c’est, presque toujours, le solitaire qui a raison. C’est une poignée de quelques hommes, méconnus, isolés au départ, qui change la face du monde. La minorité devient la majorité. Lorsque les « quelques-uns » sont devenus les plus nombreux et les plus écoutés, c’est à ce moment-là que la vérité est faussée.
…
… Les autres, ce sont les gens de votre milieu. Ce milieu peut même constituer une minorité qui est, pour vous, tout le monde. Si vous vivez dans cette « minorité », cette « minorité » exerce sur celui qui ne pense pas comme elle, un dramatique terrorisme intellectuel et sentimental, une oppression à peu près insoutenable. Il m’est arrivé, quelquefois, par fatigue, par angoisse, de désirer et d’essayer de « penser » comme les autres. Finalement, mon tempérament m’a empêché de céder à ce genre de tentation. J’aurais été brisé, finalement, si je ne m’étais aperçu que, en réalité, je n’étais pas seul. Il me suffisait de changer de milieu, voir de pays, pour y trouver des frères, des solitaires qui sentaient et réagissaient comme moi. Souvent, rompant avec le « tout le monde » de mon milieu restreint, j’ai rencontré de très nombreux « solitaires », appartenant à ce qu’on appelle, à juste raison, la majorité silencieuse. Il est très difficile de savoir où se trouve la minorité, où se trouve la majorité, difficile également de savoir si on est en avant ou en arrière. Combien de personnes, des classes sociales les plus différentes, ne se sont pas-elles pas reconnues en moi ?
Nous ne sommes donc pas seuls, je dis cela pour encourager les solitaires, c’est-à-dire ceux qui se sentent égarés dans leur milieu. Mais alors, si les solitaires sont nombreux, s’il y a peut être même une majorité de solitaires, cette majorité a-t-elle toujours raison ? Cette pensée me donne le vertige. Je reste tout de même convaincu que l’on a raison de s’opposer à son milieu… »
Je n'ai pas de commentaire à faire quant-à ce passage, mais je voudrais simplement le dédier aux amis blogueurs qui pensent et qui, se sentant solitaires, ont à un moment ou à un autre douté de leur pensée, d'eux mêmes ou de la nécessité de bloguer.
هناك 7 تعليقات:
Excellent retour avec ce texte époustiuflant d'E.Ionesco, c'est réellement la problématique à poser, tendre vers les synergies qui agglutinent le meilleurs de nous, capitaliser les idées différentes des solitaire de ceux qui rament à contre courant des " fous" sociaux qui osent braver les idées moutonneuses de la majorité, en un mot rassembler la multitude dans ce qu'il y a de mieux de ses différences qui ont la capacité d'engrener les unes avec les autres.
C'est vrai que la majorité voudrait nous faire croire qu'on est moins nombreux qu'on ne l'est en réalité, c'est de la qu'elle tire sa force. Nous notre force est dans l'opposition et la contradiction. Une phrase m'a en particulier interpellé: "s'il y a peut être une majorité de solidaires , cette majorité a t-elle toujours raison", pas forcément car de même qu'il y a un dogmatisme de la majorité , il y a un dogmatisme de la minorité.
Et c'est lorsqu'on veut échapper à la fois à l'un et à l'autre qu'on devient de plus en plus minoritaire et de plus en plus seuls
Azwaw et Trainspotting
C'est avec plaisir que je trouve, grâce à vos deux commentaires, que je ne suis pas si solitaire que ça.
Azwaw, comment déterminer les "fous" sociaux des saints d'esprits est une question à poser.
Trainspotting, cette même phrase m'a laissé si pensive que je n'ai pas oser la mettre en couleur différente!!!
il faut persevérer et ne jamais perdre confiance en soi meme Mahéva
pour le texte d'eugéne, y'a vraiment rien a ajouter, ila tout dit et tellment bien
merci pour ce morceau bien choisi
pour les fous , je préfere pas trop en parler mais nous sommes tous des fous a degrés moindre pour certains et beaucoup plus pour les autres
Hmayed
Merci pour ton encouragement. Je suis heureuse que ce morceau t'ai plu.
نص رائع ..
فالشجاعة و القوة الحقيقية ليست في ان
نمنع التفكير .. بل في ان نفكر في الممنوع
Brastos شكرا
فنان في تعاليقك كعادتك
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