Quelle éducation pour nos filles, nos adolescentes ?

Sur cet espace virtuel, je vais me permettre de raconter honnêtement et sans tabous quelque chose de très intime qui m’a permis dès mon jeune âge d’avoir des doutes par rapport à ce que pouvait me raconter les grandes personnes.
Voilà l’échange qui a eu lieu entre ma mère et moi un jour et qui est resté gravé dans ma mémoire jusqu’aujourd’hui :
- Maman, maman, c’est quoi cette tâche rougeâtre que j’ai là ?
- Oh ! heu… C’est parce que dorénavant tu vas devoir jeûner, faire le Ramadan.

Ma question, bien que me paraissant anodine maintenant, exprimait une angoisse envers l’inconnu d’une part et d’autre part une crainte de ce que pourrait être la réaction de ma mère.
Ceux qui étudient les émotions humaines vous assureront que le fait de se souvenir d’un événement bien ancré dans le cerveau de l’être humain est sûrement lié à une émotion très forte qui a accompagné ce souvenir.

La réponse que j’ai reçue n’a rien de surprenant ou d’inhabituel. C’était une réponse banale comme tout, mais elle était tellement décevante pour la petite adolescente curieuse que j’étais.
Donc, j’ai tout simplement obtenu une réponse qui liait deux choses entre lesquelles il n’y avait pas de lien logique :
Cycle menstruel => jeûner pendant le Ramadan et faire les prières.
Quelle équation constructive !

Je commençais à me demander : et celles qui n’étaient pas musulmanes alors ? Elles ne font pas le Ramadan, elles doivent être différentes, sûrement.
Heureusement pour moi, ce qui n’est pas le cas de toute adolescente née dans un milieu musulman, nous avions à l’époque un cours de sciences naturelles où nous étudiions l’appareil reproducteur.
J’ai compris alors que ce qui m’arrivait était tout simplement naturel, physiologique, et c’était d’ailleurs le cas dans le monde animal.

Mon cas était de loin meilleur à celui de plusieurs femmes ou jeunes filles qui m’ont depuis raconté leur premier contact avec leur vie d’adolescente en développement.
Une amie m’a raconté qu’elle n’a rien osé demander à sa mère par peur que ce qu’elle venait de vivre ne soit un châtiment divin pour des fautes qu’elle aurait commises et dont elle ne se souvenait plus.

Aujourd’hui avec le recul, je ne blâme pas ma mère car j’aurais pu avoir une réponse pire que la sienne telle que : « tu n’as pas honte de poser de telles questions ? »
Et puis, la mentalité de ma mère n’est que le résultat prévu d’avance d’une éducation où la fille n’avait pas le droit d’aller à l’école, même celle de jeunes filles. Bien qu’elle était une élève brillante en quatrième année primaire (les notes sur son carnet scolaire fièrement rangé représentaient pour elle un argument à qui voulait l’entendre), elle était obligée de quitter l’école parce que « ses formes commençaient à se faire voir ».

Aujourd’hui je la plains tout simplement et je promets au monde de ne jamais élever mes deux filles dans l’ignorance ou dans l’évitement de répondre à leurs questions. Et je suis certaine qu’à chaque âge correspondent les réponses appropriées.
Si jamais votre fille vous demande : « Maman, maman, c’est quoi cette tâche rougeâtre que j’ai là ? », cela voudra dire que vous ne l’avez pas préparée à affronter une question d’ordre psychologique très profond.
Essayez quand même cette réponse : « ne t’en fais pas, chérie, c’est ta vie de femme adulte qui se prépare. Cela devra arriver tous les mois et c’est tout à fait naturel… »